(Août - septembre) |
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Mercredi 22 août La nuit a été excellente. J’ai super bien dormi. Ce que nous ignorons encore, c’est que nous avons bien fait de profiter de cette courte trêve. Midi… ça recommence ! On nous annonce que l'eau va encore monter - 1 mètre de plus. Dans l’après-midi, elle envahira donc aussi le grand quai où nous pensions avoir trouvé refuge. Il faut encore déménager. Nous nous préparons… ½ heure plus tard, il y a contre-ordre…. Puis de nouveau contre-ordre. Grrr ! C’en est trop. Rémy et moi sommes de plus en plus énervés. |
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Nous voulons aller jeter l’ancre au milieu de rio et mettre Tortuga à la bouée. Nous serons alors bien plus tranquilles. Et surtout, Rémy n’aime pas du tout voir son bateau coincé de la sorte. Problème : même si nous parvenons à nous dégager des petits bateaux, nous sommes bloqués, devant, par le Soriano dont le Capitaine attend les nouvelles prévisions pourtant toujours si aléatoires. |
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Normal ! Ici, rien ne se fait jamais autrement que dans l’urgence. |
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Pour ma part, je suis dans un état de stress terrible. Et lorsque je vois une rafale de vent emporter la belle botte de 7 lieues de mon cher époux, posée soigneusement sur le dossier des bancs du cockpit « pour qu’elle sèche », expliquera-t-il ensuite… je disjoncte. |
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Ce n’est qu’une botte me direz-vous - Certes !
Et puis… allez trouver du 48 dans un pays où les pointures hommes s’arrêtent au 43 ! |
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Toujours le 22 août – 17 heures C’est décidé ! Nous allons jeter l’ancre un peu plus loin, comme nous aurions dû le faire dès le premier jour. Et nous attacherons Tortuga aux 2 bouées encore disponibles. Quant au Soriano, Rémy a réfléchit à la manœuvre : « Ça doit passer ! Ils me font suer à tergiverser. Le Capitaine a parlé. On y va ! |
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Comme nous le prévoyions, impossible d’enlever les nœuds de certaines amarres. Seule solution : le couteau. Départ sur les chapeaux de roues. Alors que nous voulons partir, le courant nous pousse contre le quai. Par chance, Alberto, notre gardien préféré, mais surtout le seul dans cette ville à daigner écouter les ordres d’un capitaine, se charge de larguer l’amarre principale. Et heureusement. Car avec un autre que lui, nous nous serions "vautrés" contre le quai – Merci Alberto ! |
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Un départ remarqué. Toujours sans dérive, coincés ainsi entre tous ces bateaux, et devant la force du courant, Vent de Folie refuse de virer. L’arrière du Soriano approche… « A fond les manettes »… nous passons ! Rémy connaît les réactions de notre bateau et maîtrise donc parfaitement la manœuvre. Mais ceux restés sur le quai sont affolés de nous voir partir aussi vite avec notre gros "balourd" et pensent que nous allons percuter le Soriano. Le Soriano a eu chaud aux fesses. Quant à moi… je craque. |
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Mouillage sur le rio Negro Nous sommes prêts à jeter l’ancre. Le Zodiac de la Prefectura daigne enfin arriver. Ah ceux là, ça fait 2 jours qu’on les attend ! |
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Pourtant, si nous leur en voulons d’avoir brillé par leur absence ces derniers jours, cette fois, nous ne pourrons que les remercier. Ils nous signalent que nous avons jeté l’ancre tout près de l’énorme canalisation des égouts (là où viennent les pêcheurs du dimanche – Beurk !). Si le vent s’y met, nous nous retrouverons plantés sur cette canalisation. Le paysage envahit par les eaux est tellement différent, nous n’avions pas remarqué. Il faut donc re-mouiller (= relever l’ancre et la jeter ailleurs). |
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Hercule entre en scène ! |
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Bien entendu, c’est le moment que choisit notre guindeau pour ne pas fonctionner. Rémy doit tout remonter à la main. 35 mètres de chaîne et 30 kilos d’ancre… soient environ 90 kilos…Gloups ! L’un des deux hommes de la Prefectura monte aussitôt à bord afin de lui venir en aide. Seconde tentative un peu plus loin, ça n’accroche pas - Rebelote ! Sauf que cette fois, je me demande si cet aimable employé de la Prefectura n’a pas regretté d’avoir été trop serviable. La chaîne remonte à la vitesse de l’éclair, tirée par un capitaine à la force décuplée par la rage. Le pauvre jeune homme tente de suivre, sans vraiment y parvenir. Tenant la barre, j’observe "ça" depuis le cockpit et pense : « Il va finir par lui arracher le bras !!! » |
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Ouf ! Nous avons réussi à mouiller. L'ancre tient. Et le jeune homme est toujours entier ! Muchísimas gracias Mario ! Mais Rémy est crevé et ses mains sont en sang. Pourtant, il faut continuer. Tortuga est toujours à quai. |
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Quelle journée ! |
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Notre annexe, regonflée hier, pourrait tenir quelques heures. Mais le moteur, lui, s’est mis en grève – moment encore bien choisi, comme d’habitude ! Rémy embarque donc dans le Zodiac de la Prefectura pour se rendre sur Tortuga. |
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… une demi-heure plus tard, Rémy débarque enfin sur le quai. |
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Allez, courage Chéri ! La journée n’est pas terminée. |
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Pour ma part, je reste à bord. Tout d'abord, on n'abandonne jamais un bateau aussitôt après avoir jeté l'ancre (au cas où elle décrocherait). Et j’avoue que cela m'arrange bien. Il y a bien assez de monde pour aider sur le quai. Mais, vu notre départ tout à l'heure, je ne respirerai de nouveau que lorsque Tortuga sera à la bouée. |
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Sur le quai, tout le monde attend Rémy. Aidé de nouveau par Marco (qui a lâché son portable !), d’Attilio, et du Zodiac de la Prefectura, Rémy prend la barre de Tortuga. |
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Cette fois encore, mon excellent Capitaine réussit parfaitement la manœuvre. |
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Depuis le Zodiac, Marco fixe les amarres aux bouées. Mais qui tire comme un forcené sur les amarres pour rapprocher ce Tortuga en acier ? … Mon Hercule ! Sûr qu'il va bien dormir cette nuit… si notre mouillage tient bon !...? |
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D’autre part : Avis aux navigateurs !
A ce propos, il serait temps d’informer nos chers amis, propriétaires de Tortuga, de ce que nous vivons en ce moment. Car pour l’instant, ils n’en savent rien. Nous les avions simplement avisés lorsque l’eau avait monté et atteignait le haut du quai, sans les inquiéter outre mesure puisque nous gérions la situation. Mais, depuis, nous avons été un peu surbookés. Alors pour ce qui est d’avoir écrit des mails…. Dès que nous le pourrons, nous les informerons. Et nous sommes certains que les photos de leur Tortuga sur un quai invisible, puis à la bouée au milieu du rio, va être une sacrée surprise. |
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18 heures 30 – Tortuga est à la bouée. |
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Il fait une chaleur anormale pour cette saison - 31 degrés dans le carré. Mais le mouillage est tranquille. Nous soufflons enfin et pouvons apprécier ce paysage complètement transformé...étonnant… |
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...mais superbe. |
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Coucher de soleil sur l'île
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Le lendemain 23 août |
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En manque d’occupation (?!), Rémy tentera de réparer le guindeau (treuil pour remonter la chaine d'ancre)... en vain. Mais il fera des miracles avec notre annexe qui tiendra plusieurs heures sans se dégonfler - Chic alors ! Quant au moteur hors-bord, sous les bons soins de son capitaine, il daignera cesser la grève !
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Dans la nuit… |
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Alors que nous pensons pouvoir enfin nous livrer en toute quiétude aux bons soins de notre amie Morphée, le vent se lève. Une violente tempête fait rage. Moi, le vent, ça m’inquiète au port. Alors au mouillage… Je me lève donc pour jeter un œil par les hublots. ("décrocher" est l’une des grandes appréhensions de tous les "voileux". Dans le jargon maritime, cela signifie que l’ancre n’a pas tenu. Toute bride ainsi lâchée, le bateau dérape au risque de terminer dans les arbres pour le cas présent, sur la plage ou, pire, sur les rochers lorsqu’il y en a.) Rémy saute en bas du lit et, quoique sceptique, regarde lui aussi… Toujours rapide comme l’éclair, Tortuga repasse devant les hublots…. Gloups ? Nous mettons quelques longues secondes à comprendre. En fait, Tortuga est toujours amarré. Mais… |
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Les chaînes (qui tiennent ces bouées au fond de l’eau) étant sûrement très longues, Tortuga, poussé par ce vent violent, a toute latitude pour se promener d’un côté à l’autre du rio. De son côté, Vent de Folie, poussé par le vent lui aussi, a avancé sur son ancre et donc sur Tortuga. Après ces 2 passages de la bête en rut devant les hublots de Vent de Folie, nous restons aux aguets. Tortuga, déchaîné, virevolte de droite et de gauche à une vitesse impressionnante. Lorsque, dans un bruit d’enfer, cette furie passe sur notre chaîne d’ancre, nous sommes très inquiets. Nous démarrons le moteur afin de reculer en tendant notre chaîne. Puis nous laissons le moteur allumé et décidons de faire des quarts (veille qui se fait normalement en navigation). |
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Des quarts lorsqu’on navigue, d’accord ! Mais au mouillage… Grrr ! Il est 4 heures du matin. La nuit va être longue. Le repos n’aura pas duré longtemps ! |
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Vendredi 24 août La poisse continue ! |
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Temps pluvieux, gris et froid. Quant au niveau du Rio Negro, ça ne s’arrange pas : |
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1ère corvée : refaire l’amarrage de Tortuga. Une bouée sur l’avant, une autre sur l’arrière. Ainsi, il ne risque plus de tenter la fugue et va peut-être nous laisser dormir en paix. 2ème corvée : le moteur de l’annexe fonctionne de nouveau. Rémy va pouvoir aller acheter du pain frais et autres broutilles, histoire de varier un peu des pâtes. |
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Mais... il n’aurait peut-être pas dû. Car c’est là que…. |
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L’eau a tout envahit. Dans le port, on ne discerne plus rien. Poteaux, compteurs et une grande partie de la cabane du gardien, tout est sous l’eau... |
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...et à fortiori, le quai. |
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A bord de notre pauvre vieille annexe, Rémy quitte donc le bord pour nous ravitailler. Je l’observe depuis le bateau. De loin, je discerne bien la limite du quai. Il va trop loin… beaucoup trop loin… Je tente de l’en avertir par de grands gestes, mais il ne regarde pas vers Vent de Folie. Soudain l’annexe se cabre, le moteur se lève et cale. Cette fois, Rémy tourne la tête vers moi. Je devine sa mine déconfite. Il termine à la rame. Conséquences : toutes les pâles de l’hélice (neuve) sont cassées - MERDE !!!!! Non seulement il est passé sur le quai, mais aussi sur l’un des supports de compteur… en béton. Ça, ça ne pardonne pas ! Par chance, le moteur tourne malgré tout. Nous pourrons toujours nous ravitailler. |
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Quelques jours plus tard… |
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Le rio retrouvera un niveau à peu près normal. Nous pourrons reprendre notre place le long du quai. Nous retrouverons le courant et l’eau et pourrons reprendre le travail normalement. | |||||
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Nous sommes fin août. Nous pensons le phénomène « creciente » terminé pour cette année. Hélas, nous nous trompons . . . |
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19 septembre - soit un mois plus tard… ça recommence ! |
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Depuis hier, il pleut et un vent très violent souffle sur le Rio de la Plata. Il ne fait pas bon être en mer. Toute la nuit et toute la journée : pluie diluvienne et vent fort - Midi : l’eau a déjà atteint le haut du quai. Zut alors ! ll va encore falloir déménager. Y-en a marre de ce rio Negro ! |
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Depuis notre retour à quai, après la précédente inondation, nous sommes à couple de Tortuga, afin de pouvoir mieux le surveiller. Mais notre ami Marco s’étant absenté pour la semaine, nous devons cette fois nous occuper également de son catamaran, Tucano, amarré à Vent de Folie. | |||||
3 bateaux sous notre responsabilité. Dans de telles conditions, ça fait un peu beaucoup. Mais nous devons assumer. Les amis, c’est fait pour ça ! |
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Et une fois de plus, plus de courant. Cette fois, l’hydrographie n’a pas attendu longtemps pour enlever les compteurs. Et après la décrue, il va encore falloir attendre des jours le bon vouloir d’un électricien pour venir les remettre – Grrr ! | |||||
Cette crue est bien plus rapide que la précédente. L’eau monte de 6 centimètres par heure. |
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Mais Rémy a pris une décision : il ne quittera pas le quai. Et quand mon Capitaine décide, on ne le fait pas changer d’avis ! De toutes manières, avec ce vent, impossible d’envisager d’aller au mouillage ou n’importe où d’ailleurs. Ce serait bien trop dangereux.
Ainsi, si l’eau monte encore, notre Hercule pourra tirer très fort sur les amarres et écarter les 3 bateaux du quai. Et si les amarres sortent des poteaux avec la montée des eaux, nous serons toujours tenus par les 2 bouées.
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Branle-bas de combat chez les Français ! |
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Toutes les amarres disponibles sur Vent de Folie sont sorties des coffres. Nous dévalisons Tortuga pour en trouver d’autres. Avec l’autorisation des Ratatons, nous sortons également leur annexe. Car la nôtre... |
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…la voici… après gonflage !? ![]() |
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L’annexe de nos amis est en bon état, mais elle est petite. Le moteur + Rémy … nous n’osons même pas essayer ! C’est donc à la rame que notre valeureux Capitaine ira accrocher les amarres aux bouées. |
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Séquence fou rire |
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Mon pauvre Capitaine revient trempé jusqu’à la ceinture. |
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Peu de temps après, le vent faiblit. Le soleil se montre enfin. Tout redevient calme. Tant mieux, je vais pouvoir dormir cette nuit ! |
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Vendredi 21 septembre
Le vent et la pluie se sont calmés. Pourtant, l’eau recommence à monter. Nos amarres traversent de toute part. |
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D’un côté, les amarres de Tortuga sont toujours retenues par les poteaux. De l’autre, celles aux bouées écartent les bateaux du quai. Reste à voir si ça suffira pour nous éviter de "déménager". |
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Nos amarres sont toujours accrochées - Ouf ! Ça marche !
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Bon, cette fois, j’espère que c’est la dernière !
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