« Yerra » signifie le marquage du bétail. Mais c’est aussi le nom donné à la fête qui accompagne toujours ce travail en équipe.

Dans la semaine, notre fidèle ami Marco nous informe qu’une fête « gaucho » des plus typiques a lieu ce dimanche 16 octobre à Saca Chispas, petit village à une cinquantaine de kilomètres, à l’est de Mercedes.

Nous lisons le prospectus :

Se juntan los mas destacados Paisanos-Camperos, para demostrar toda la "Vaquia", destreza y coraje los valores que hicieron grande nuestra Patria.

En résumé, nous pourrons assister au travail des gauchos (capture des vaches au lasso, marquage, rodéo…), comme nous l’avions fait à San Antonio de Areco, grand festival de Gaucho, l’an dernier en Argentine.
Sauf que, cette fois, il s’agit d’une fête locale des plus typiques semble-t-il.

A l’issue du spectacle, l’incontournable "asado" avec une spécialité : « Vaca con cuero » (vache cuite avec la peau).

Puis : « Gran Bailanta Campera » (grand bal de campagne).

Il n’en faut guère plus pour nous décider.

Nous irons à Saca Chispas ce dimanche.

Fête gaucho à Saca Chispas

La fête commence au lever du soleil, a précisé Marco. Il faut donc partir de bonne heure pour ne rien louper.

Soit !

Levé 6 heures – Départ 7 heures du mat’

D’ordinaire, l’équipage d’Illawong (nos voisins australo-canadiens) est sur pied encore plus tard que « les Vent de Folie ».
Mais cette fois, Julia tient absolument à nous accompagner et, à notre grande surprise, sera prête à l’heure convenue.
Phil, quant à lui, préfèrera rester sous la couette. Cela tombe bien, car 4 personnes dans la Mehari, nous aurions probablement dû nous relayer pour pousser !

 

Saca Chispas n’est qu’à une cinquantaine de kilomètres de Mercedes.

Mais avec la Super Mehari Turbo diesel de Sophie,  il nous faudra plus de 2 heures (encore un grand merci à Sophie et Alain pour leur confiance qui, aujourd’hui, nous permet d’assister à cette journée).

Il est très exactement 7 heures lorsque nous nous installons dans notre carrosse.

Rémy prend alors la position du coureur cycliste qui veut braver la tempête.

En voiture m’sieurs-dames !

Après 35 kilomètres de route, nous prenons une large piste rouge. Nous "bouffons" la poussière. Au retour, la Mehari sera aussi rouge à l’intérieur qu’à l’extérieur.

A l’approche de Saca Chispas, nous croisons des gauchos qui guident les vaches, probablement vers le lieu de la fête.

Arrivée à Saca Chispas

Il est encore très tôt. Ne sont présents que les personnes organisant cette journée. Nous avons sérieusement besoin d’un café mais ici, il n’y a que de la bière ou des sodas. Nous poursuivons donc jusqu’au village.

A pied, en voiture ou à cheval, tout le monde nous salue.

Les maisons sont minuscules et charmantes. Mais pas moyen de boire un café.

Il y a bien une maison qui sert à boire, nous dit-on : « De la bière ou du maté, mais pour le café, vous n’en trouverez pas !».

Tant pis !

Nous repartons sur le campo.


Il nous faudra patienter 2 bonnes heures avant de voir arriver les premiers visiteurs.

Nous avions oublié que « tôt » en Uruguay, signifiait « à partir de 10 heures » !

Mais nous ne le regrettons pas.

Avec grand plaisir, nous flânons auprès des chevaux qui profitent eux aussi de ce calme provisoire.

Julia semble apprécier autant que nous cette "bouffée" de campagne.

Il fait froid et, après ce levé très matinal, certains commencent à montrer des signes de fatigue (!).

Nous observons les villageois occupés à préparer le campo pour la fête et les gauchos, certains vêtus de la tenue traditionnelle, tous fiers de participer à l’évènement.

Puis les visiteurs arrivent et s’installent sur l’herbe pour la journée.

Ils ont tout prévu : tables, chaises, avitaillement.

Certains ont même des bâches qui, tendues entre 2 voitures, les abriteront du soleil toute la journée.

Même l’ambulance est arrivée.

La rouille est partout et le brancard est garanti « d’époque ».

Quant à cette curieuse mobylette…  

…incroyable, mais elle roule !

10 heures

La « Yerra » commence

Certains gauchos portent leur nom inscrit sur leur ceinture.

Nous croyons rêver lorsque nous découvrons le nom de celui-ci : Zugarramurdi.

 Zugarramurdi est le nom d’un village du Pays Basque sud que nous connaissons bien.

 

Nous ne résistons pas à entamer la discussion avec lui.

Il nous dit avoir entendu parler de ce village. Il ignore depuis combien de générations sa famille est en Uruguay. Par contre, il a entendu parler d’une légende sur les sorcières de Zugarramurdi.

Or, ceux qui connaissent ce village connaissent aussi la célèbre grotte aux sorcières.

Nous savons que les Basques sont nombreux en Uruguay, mais là quand même !

Ce chanteur accompagne  à la guitare les chants qu’il improvise au fil de la « vaquia ». Les paroles ventent les efforts et la témérité des gauchos.

Cette coutume ne viendrait-elle pas de nos bertsulari qui improvisent des poèmes (bertsu=poème) ?

Les taurillons, parqués dans le corral, sont poussés les uns après les autres vers le couloir de contention, puis vers la sortie.

La « vaquia »

Les gauchos sont en place pour tenter de les capturer au lasso.

Ici, c’est la partie que je n’aime pas !

Le lasso arrête net la course de ces pauvres bêtes qui tombent tête la première.
On se demande comment les cervicales résistent.

Heureusement, ces gauchos ne semblent pas très habiles et sont surtout là pour s’amuser. Les vaches parviennent donc souvent à esquiver les dizaines de lassos.

Lorsqu’un taurillon est pris, l’équipe le couche sur le côté et la pauvre bête passe quelques minutes douloureuses.

Un cavalier, « el dueño » (le patron), du haut de sa monture, se saisit alors d’un fer chauffé et l’apporte à ses gauchos.

Les gauchos procèdent au marquage.

Des odeurs de viande roussie parviennent jusqu’à nous.

Le cavalier extrait de l’arrière de sa ceinture le long couteau dont les gauchos ne se séparent jamais.

Mais le plus terrible est à venir.

Ce couteau va servir à la castration.

Sans aucune anesthésie, en quelques secondes, le taurillon se retrouve dépossédé de ses « objets précieux ».

Le cavalier revient alors vers le corral,  arborant fièrement ce trophée.

Rémy apprécie le spectacle.

Moi, je souffre pour les taurillons et pense à ce que ces hommes diraient si on leur faisait subir la même épreuve.

Quant à Julia, elle n’a rien vu. Et lorsque nous voulons lui montrer les photos, elle tourne la tête.

A l’issue de la démonstration, les gauchos se régaleront de ces testicules de taurillons grillés à la braise.

Midi

Marco et Mabel  nous ont rejoints, accompagnés de Santiago et Teresita, oncle et tante de Marco, que nous apprécions beaucoup.

Marco connaît tout le monde ici. Il s’échappe derrière le corral et revient en nous proposant de goûter à ces grillades si particulières que se sont réservées les gauchos.

Ames sensibles s’abstenir !

« Muy rico ! » (c’est très bon !), nous dit-il. Ça a la consistance de la cervelle »

Non, non, vraiment sans façon !

Par contre, dans un coin du campo, des chorizos (grosses saucisses) grillent doucement sur l’énorme parilla et l’odeur aiguise nos appétits.

Mais nous attendons surtout « l’Asado con cuero », spécialité de la région, annoncée sur le prospectus.

Quelques temps plus tard, une camionnette arrive enfin. C’est la viande.

Asado con cuero

Soudain, le comptoir est pris d’assaut.

La viande est vendue au poids.

Deux vaches ont été tuées pour l’occasion et chacun aura sa part.

Nous nous installons sur le comptoir d’une buvette, dans un autre coin du campo et goûtons à cette viande tendre et juteuse, dont la peau a été couverte d’épices avant d’être cuite.

Cette année, la viande à été cuite au four, car à la braise, c’eut été bien trop long.  « C’est dommage, car cuite au feu de bois, c’est encore meilleur », nous disent nos amis connaisseurs.

Nous nous régalons malgré tout et dégustons ensuite les pasteles, l’une des spécialités d’Uruguay .
Ces gâteaux sont constitués de dizaines de pâtes feuilletées très fines et farcis de pâte de membrillo (pâte de coing dont sont farcis presque tous les gâteaux, quand ils ne le sont pas de Dulce de leche).

Désolée, on les a tous mangés. Je n'ai pas eu le temps de prendre une photo.

Je peux juste vous dire que c’était drôlement bon !!!



Les estomacs sont rassasiés.

Rien de tel qu’une petite danse pour digérer . . .

Vous êtes sûrs qu’il n’y a pas une goutte de café par ici ?

 


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