Cette
          traversée
        devant durer 5 longues journées (nuits incluses bien sûr!). 
    Environ 550 milles, soient environ 110 heures. Inutile de vous dire que je vais avoir le temps de vous la raconter cette traversée... En long, en large et en travers… mais pas trop DE travers, je l'espère!  | 
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     Alors que vous
        lirez ces lignes, tranquillement assis(es) dans votre confortable chaise
        de bureau, MOI, je vais au mieux m'ennuyer à mourir, au pire être
        malade ou morte de trouille. Que nenni! A part quelques brèves indications, je vais simplement vous faire vivre cette traversée telle que je la "subirai", au fil des heures. Ces aveux dussent-ils me coûter critiques et railleries de votre part (car je m'attends déjà au pire), j'aurais au moins l'impression d'être moins seule!  | 
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On y va! Nous sommes le mercredi
            13 septembre 2006.  | 
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C'est parti ! 1er jour  | 
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Voiles
          : génois
        seul  Allure : au près (souvenez vous : c'est l'allure la plus "inconfortable") Mer : désordonnée Vitesse : 6 nœuds L'estomac rappelle sa présence - Impossible de rester dans le carré. Bon ! J'ai compris – On y va pour 5 jours de mal aux fesses, assise dans le cockpit !  | 
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11
          heures - Nous passons
    le Cap Spartel.    ![]()  | 
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20
          heures  Plus de vent - Moteur  | 
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     Nous
        sommes alors soumis au gré des
        vagues et elles s'en donnent à cœur joie. Aucun de nous
        ne se sent vraiment au top, même Rémy. Imaginez! La nuit est tombée. Candice prend son quart de veille, sa lampe frontale et sa pile de bouquins… 3 heures du mat. Elle nous réveille. Le vent s'est levé, il faut en profiter pour mettre les voiles. Un ris dans la grand voile et génois. 4 heures du mat.    | 
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    "Alors Capitaine, toujours super la nav.?" | 
Je vous interdis de vous moquer du ciré jaune!         Parce que, pour la veste de quart
        tout confort,   | 
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"TON bateau ! TES voiles, TA mer, TON vent…!" N'est-on pas
        mariés
        pour le meilleur et pour le pire? On est seuls sur cet océan. Tout seuls! 
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Plus un bateau à l'horizon. Pas le moindre cargo ou chalutier à surveiller, histoire de s'occuper en se demandant s'il va passer devant…derrière…ou dessus!         Pas âme qui vive.  
 Ça bouge toujours autant. Mes nausées se portent bien.
        Juste un petit mal au ventre et quelques brûlures d'estomac supplémentaires,
        rien de plus!   | 
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| "Nesrin – Tu pourrais pas venir avec ta tronçonneuse?" (cf. page retour Tanger) | |
Je pense déjà à la
        traversée
      des Alizés.  Et bien moi, j'ai du mal à y croire. On n'y est pas encore au Brésil, c'est moi qui vous l'dit!  | 
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3ème
           jour  | 
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6        heures du mat.  Nous filons à 7,5 nœuds. La mer est relativement calme.  | 
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    C'est beau, hein? | 
J'aime
          pas… les
    nuits noires!!!!!! 
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 Auto-portrait d'une pauvre femme déprimée!  | 
  
12 heures A peine sortie des bras
        de Morphée,
        Rémy m'annonce 2 grandes nouvelles.   | 
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| On y va pour les nouvelles du jour: | |
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"Ô rage! Ô désespoir!… N'ai-je donc tant vécu
    que pour cette infamie?"  | 
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    Le boîtier, le voilà.    | 
  
Et le court circuit, le "Voili" :  | 
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"Bon, j'vais quand même pas vous mettre une photo des toilettes?" "Si ?" . . .  | 
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"Non!
      Je ne le ferai pas. Mais 
    vous pouvez me croire. Quand je vous dis poubelle, c'est poubelle!"  | 
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Nous qui ne savions que faire de nos journées. 65 heures à barrer, de jour comme de nuit, voilà de quoi occuper notre temps!!! Impuissant et abattu, Rémy se plonge dans les catalogues de matériel. Sa mine ne présage rien de bon. A 4000 euros le pilote neuf, si
        nous ne trouvons pas un boîtier compatible avec notre vieux modèle
        Robertson, nous avons de belles heures de barre en perspective!   | 
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Affaire à suivre!  | 
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Une chose
        est certaine : "Entre les "chiottes" et le pilote, t'es pas prêt d'l'avoir, mon chou, ta veste de quart!"  | 
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13 heures. La mer est belle. Parfois des vagues de 4
      mètres soulèvent   | 
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Candice se lève.  Au boulot!  | 
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Candice, parlons-en justement!  | 
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Alors qu'elle n'aimait
        pas du tout les premières
      24 heures et que mon mal au ventre empire et se trouve des copains, voici
      ce qu'elle me sort alors qu'il fait nuit et que   | 
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     "Franchement
          l'Atlantique c'est autre chose que la Méditerranée. On
          fait de la voile au moins. Et puis, t'as vu la mer comme elle est belle!
          T'as vu les vagues! Franchement c'est génial! Et le coucher
          de soleil… Franchement c'est trop beau!… J'comprends
    pas pourquoi t'aimes pas ça!"  | 
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     "Et
        ben, FRANCHEMENT, la mer c'est beau d'accord mais 1 jour, ça suffit!!! Si t'aimes tant ça, tu la feras la traversée des Alizés. Moi, je retournerai chez ma mère et en quelques heures d'avion, je vous rejoins au Brésil."  | 
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       Et
    de poursuivre imperturbable :  | 
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"Regarde là (me montrant le sillage du voilier qu'illumine, il est vrai magnifiquement, le plancton ainsi remué), ça brille, c'est beau… Franchement Maman, tu devrais regarder!"  | 
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     "NON!
        Je ne veux pas regarder. Le plancton, ça
      fait un an que j'en vois. Et la mer, je sais qu'elle est belle, je l'ai
      vue toute la journée et je sais trop qu'elle est toujours là sans
    en plus la regarder me narguer à 30 cm de moi!"  | 
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Mais personne ne comprend donc que tout ce que je veux, c'est retrouver le plancher des vaches… avec ou sans vaches!  | 
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    "Vous m'croyez quand
        j'vous dis que j'en peux plus ?!" 
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|   Toujours
      au mieux de ma forme, je pars m'allonger dans le carré. J'entends
      leurs discussions sur les constellations, Einstein et la notion de temps
      dans l'espace.  | 
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Je
      pense : "Et
        la notion du temps en mer… ça vous intéresse? Parce que ça,
        je peux vous en parler!"  | 
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4ème jour Candice prend du galon!  | 
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Cette nuit, suite à notre panne de pilote et non contente de nous avoir relayés quelques heures dans l'après-midi, Candice a barré seule durant plus de 7 heures, sous voiles, maintenant une vitesse de 6,5 nœuds, avant d'aller se coucher épuisée. Qui ne le serait pas? Nous envisageons donc de l'élever au grade de second, place que je lui céderai volontiers. Pendant ce temps Rémy dormait et pour ma part, je me reposais
        tout en veillant sur ma progéniture, m'inquiétant toutes
        les heures de sa santé :  A part une petite faim et un besoin bien naturel durant lequel elle accepta de me laisser la barre, je fus simplement renvoyée: "Mais qu'est-ce que tu fais là. Va dormir. Tu va être crevée!" 
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Dormir?   | 
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Et puis de
        toute manière, crevée,
      je le suis déjà. 4 jours que je mange peu, que j'ai mal au
      ventre. Même fumer me dégoûte, c'est vous dire! Au moins j'aurai fait une petite cure de désintoxication. C'est ma mère et ma copine Annie qui vont être contentes!  | 
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Les
        heures passent. Nous tenons
        le cap péniblement à 4,5
        nœuds.  En fin d'après midi, le vent forcit légèrement.         Le capitaine agacé par cette vitesse
        d'escargot décide
        de prendre les choses en main. 
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Puis il prend les commandes. 
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"Et
        quoi de mieux qu'un capitaine content de son bateau!!!"  | 
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    "Allez, vire de là
        et laisse moi  barrer...  J'adooore ???!" 
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Nuit
      du  4ème au  5ème
      jour  | 
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1 heure du matin. 
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Candice
          est à la
        barre. Elle peste, râle, jure.  
 Non mais. Qui c'est qui commande ici?!! Les voiles battent dans un boucan
          infernal raisonnant dans le carré.
        Des grognements émanent de la cabine indiquant que Rémy
        dort.   | 
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     Mais
      comment fait-il?  | 
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Je n'en peux plus. Je saute dans le cockpit.  Ça va bien maintenant! MOTEUR! Candice râle de plus belle
          :  Rémy arrive alors, pensant que nous l'avions appelé, habillé et dans un état semi-léthargique. Candice et moi en duo : "Qu'est-ce que        tu fous là ?"      . . .
          Candice tient jusqu'à 4
        heures du matin. Ensuite Rémy
        et moi nous partageons la journée. Quand je dis "partageons",
        disons plutôt que nous tenons la barre autant que nous le pouvons,
        chacun laissant dormir l'autre tout aussi épuisé, le plus
        longtemps possible.  | 
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Nous
          sommes à la
        barre depuis presque 50 heures. Il en reste encore une vingtaine. Nous n'en pouvons plus.  | 
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5ème
          jour 
    Bientôt la quille!  | 
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Vent toujours inexistant.
         
    Mer plate ... ça change!  | 
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Il est 10 heures.  | 
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Nous
          sommes toujours au moteur, contraints de crier afin de s'entendre entre
          carré et
        cockpit.  Non,
        non. Je n'ai pas pris la bôme sur la tête. C'est juste
        nerveux!   | 
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Nous sommes à 65
      milles de Porto Santo.  | 
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Je suis à la barre. Ça roupille dans les cabines et dehors toujours pas âme qui vive. Même plus un poisson lune! … J'ai l'impression que 3 heures se sont écoulées depuis ces dernières notes. Il n'est pourtant que 10 heures 30 et qui vois-je à l'horizon : Des dauphins. Il y a donc encore une vie sur cette planète! Rémy s'est levé. Mais vu la tête qu'il a, je me
        fais un casse-croûte (on dirait que l'appétit revient, je
        mangerais un bœuf!) et le renvoie au lit.  | 
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Midi  | 
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Rémy et Candice dorment toujours.
        J'aperçois un 'truc" rouge sur tribord. Je me détourne.
        On ne sait jamais. La mer est toujours on ne peut plus calme et le soleil
        est éclatant,
        voire éblouissant. Nous l'avons plein face.  | 
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Dans
          l'après-midi, nous devinons, au loin, les côtes de Porto Santo.  | 
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          21 heures (heure du Maroc). 22h 30.  | 
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Impressionnant de foncer droit sur la côte
        sans y voir quoique ce soit.  Ça n'arrange pas mon mal au ventre. 23h 30. Nous contournons l'Ilheo de Cima (îlot à l'Est de l'île) . Heureusement les lumières de la ville éclairent la baie. Ça remue  un peu. Rémy ralentit
        le régime
        afin que je puisse mettre les pare battages et préparer les amarres
        sans me fiche à l'eau.  | 
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Nous entrons dans le petit port de Porto Santo.  
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Un petit tour pour chercher
        une place au ponton.   | 
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Nous
          avons parcouru 590 milles en 111 heures, soit une moyenne de 5,3 nœuds.  | 
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Mmmmm! Qu'elle va être bonne cette nuit!  | 
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